De la musique avant toute chose,
Et pour cela préfère l'Impair
Plus vague et plus soluble dans l'air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.
Commentaire
Extrait du recueil "Jadis et Naguère"(1874), ce poème de neuf strophes de quatre ennéasyllabes est considéré comme un manifeste symboliste. Verlaine y décrie le romantisme et le Parnasse et milite pour une poésie faite d'émotion et de musicalité.
Les sanglots longs
Des violons
De l'automne
Blessent mon cœur
D'une langueur
Monotone.
Commentaire
Ce poème, issu des "Poèmes saturniens" (1866), est l'un des plus célèbres de Verlaine : sur Radio Londres, ses premiers vers - sous une forme un peu altérée ont en effet annoncé à un réseau de Résistance l'imminence du débarquement en Normandie.
Dans le vieux parc solitaire et glacé
Deux formes ont tout à l'heure passé.
Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
Et l'on entend à peine leurs paroles.
Commentaire
Poème de clôture du recueil "Fêtes galantes" paru en 1869, il y apporte une touche sombre et pessimiste : à travers un dialogue stérile entre deux anciens amants, Verlaine dépeint en fait les désillusions de l'amour.
Le ciel est de cuivre
Sans lueur aucune.
On croirait voir vivre
Et mourir la lune.
Commentaire
Ce poème au rythme et aux rimes très fluides est issu du recueil "Romances sans paroles" (1874). Écrit au cours de voyages que Verlaine fit avec Rimbaud, le poète y livre la description impressionniste d'un paysage qui reflète en réalité son intériorité.
Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches
Et puis voici mon cœur qui ne bat que pour vous.
Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches
Et qu'à vos yeux si beaux l'humble présent soit doux.
Commentaire
Ce texte extrait du recueil "Romances sans paroles" est composé de trois strophes de quatre alexandrins. À travers la nature qu'il dépeint sur un ton élégiaque, Verlaine y évoque ses états d'âme, son désir d'aimer et d'être aimé.
C'est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine
Mon cœur a tant de peine !
Commentaire
Ce poème extrait des "Ariettes oubliées" est une variation, en quatre quatrains, sur la mélancolie. Transparence de l'eau et limpidité des vers y traduisent le vide d'une conscience en proie à l'ennui. L'entrelacs pluie/larme en est la ligne directrice.
Je suis venu, calme orphelin,
Riche de mes seuls yeux tranquilles,
Vers les hommes des grandes villes :
Ils ne m’ont pas trouvé malin.
Commentaire
Ce poème, composé de quatre quatrains, évoque sur un ton élégiaque la mystérieuse destinée d'un adolescent allemand surnommé "l'orphelin de l'Europe". Extrait du recueil "Sagesse", il a notamment été mis en musique par Georges Moustaki.
Qu'as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ?
Commentaire
Écrit alors que Verlaine attend son transfert pour la prison de Mons suite aux blessures par balles qu'il a infligées à Rimbaud, ce poème du recueil "Sagesses" incarne à la fois faiblesses et remords de l'auteur ainsi que son aspiration à la liberté.
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
Commentaire
Ce texte est une occasion pour Verlaine d'évoquer sa condition de poète meurtri, hyper sensible, aux pulsions amoureuses d'adolescent. Car c'est bien de lui qu'il s'agit derrière la femme qui lui apparaît dans ce fameux songe issu des "Poèmes saturniens".
Nous étions seul à seule et marchions en rêvant,
Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
Soudain, tournant vers moi son regard émouvant
" Quel fut ton plus beau jour? " fit sa voix d'or vivant
Commentaire
Ce poème au titre anglais évocateur, issu de la section "Mélancholia" des "Poèmes saturniens", traite de la nostalgie à travers l'évocation du souvenir d'un premier amour perdu. On pense au vers de Nerval "le bonheur passait, il a fui !".